Le premier service anti incendie à Sète.

Avant 1789, Sète était un gros bourg de près de 9 000 habitants. Il s'est urbanisé peu à peu (pavage et nettoiement des rues). Mais lutter contre les incendies était difficile, faute de service spécifique anti incendie.Suite à de nombreux mécomptes, le corps de ville organisa la lutte anti feu par une délibération du 17 janvier 1784.

 Curieusement, parmi les raisons justifiant la mise en place d'un corps anti incendie, le consul de la Communauté n'évoque pas l'incendie qui ravagea la manufacture de tabac , en septembre 1779, dont nous aurons l'occasion de reparler. Le conseil de ville invoque "la triste expérience qu'on vient de faire lors du dernier incendie dans la nuit du 15 au 16 du mois à la maison du Sieur Cornu".

Et, d'après le secrétaire, "le matériel a manqué pour lutter contre les flammes". Plus grave, les volontaires, semble-t-il, ne se sont pas bousculés pour "calmer l'incendie". C'est scandaleux, note le secrétaire. L'incendie ne fut circonscrit et éteint que par l'intervention de la troupe en garnison à Sète et des équipages des bateaux stationnant dans le port.

Ainsi, il n'y avait ni personnel, ni matériel spécifique pour lutter contre les sinistres, fléau de l'Ancien Régime économique où l'on utilisait davantage de bois dans la construction. Il est bien spécifié que les officiers municipaux durent user d'autorité pour inciter à lutter contre l'incendie de la maison Cornu. Mais on peut douter de l'efficacité de tels "volontaires", au surplus dépourvus de moyens d'action.

 Les choses ont dû changer après janvier 1784. Désormais, il y aura un corps anti incendie pourvu de moyens. Les moyens ? La Communauté va emprunter auprès des habitants de la "ville" pour acheter 4 pompes munies de manches en cuir pour "faire parvenir l'eau du canal dans les quartiers les plus élevés de la ville". A cela s'ajouteront 300 paniers goudronnés, sans doute pour faire la chaîne à la sortie des pompes.

On se soucie d'étouffer le feu, sûrement avec de la terre puisqu'on fait l'achat de 60 pioches et 50 "pailes" (pelles) de fer. On achètera aussi 4 brouettes. On se soucie également de limiter les dégâts car on prévoit l'achat de scies et de haches, sans doute pour arrêter la progression des flammes. Le personnel de ce premier corps de "pompiers" sera composé de 4 "divisions" de maçons, charpentiers, plâtriers, couvreurs, dont les membres seront choisis par les officiers municipaux. Charpentiers, menuisiers et autres artisans se feront remplacer pour répondre à l'appel quand sonnera le tocsin. Ils devront être sur les lieux du sinistre un quart d'heure après. Leur retard ne pourra excéder deux heures, sous peine d'une forte amende.

 Les "pompiers" ne doivent obéir, pour éviter la confusion, qu'à leur chef de division. Ceux-ci prennent leurs ordres des Ingénieurs du roi ou d'un architecte qui, normalement, doit être présent sur place. Structure, hiérarchie, discipline ont certainement contribué à venir à bout du fléau des incendies.

Hervé Le Blanche