Depuis 1864, la pratique de la course à la voile était associée à la vie locale et les régates avaient leur place dans les grandes festivités lors de la Saint Louis. Chaque année, à de rares exceptions près, les compétitions étaient présentes parmi les nombreuses animations présentées lors des trois jours de fête. Ce fut le cas lors des fêtes du bicentenaire de la ville, en 1866.
Elles furent célébrées en présence de foules nombreuses. Le journal Le Messager du Midi affirme que 12 000 personnes étaient venues de l'extérieur par le chemin de fer (la ville comptait près de 25 000 habitants). Dans la rade, était présente une division de l'escadre de Méditerranée. Tous les navires étaient pavoisés. Hautbois et musique du 17ème de ligne égayaient la foule. Le 26 août, la ville s'éveilla au son des cloches et des salves d'artillerie. Avant les réjouissances profanes, les autorités, les corps constitués et les consuls des puissances étrangères assistèrent à la messe à l'église Saint Louis.
Et puis, commencèrent les jeux : la course au capelet et les joutes. Le vainqueur fut félicité par le sénateur Chevalier, ainsi que par M. le préfet en personne. Le lendemain, sous un ciel maussade, un cortège historique partit de la rue des Casernes vers l'Esplanade où s'élevait une colonne commémorative. Ce fut alors le temps de l'éloquence. M. le maire de Cette prononça un discours évoquant la fondation du port, Louis XIV, Saint Louis, Colbert et...Napoléon III. Un conseiller municipal, M. Eugène Vivares et le docteur Roux déclamèrent des poèmes à la gloire de la cité. Il était même question, pour ce médecin lettré, "d'envahir l'espace illimité" !
Le soir, le temps s'étant gâté, il fallut reporter la fête vénitienne (parade, sur le canal, de nacelles ornées de lanternes) et le feu d'artifice. Les régates furent remises au dimanche suivant. C'est le 2 septembre, à deux heures, que le canon de l'aviso Le Passe-partout annonça le début de la course. Une aussière était tendue de "la pointe Richelieu" (où est aujourd'hui le pilotage) à une gabarre située à la moitié du môle. Au signal, on abaissait le câble et les embarcations hissaient leurs voiles. Les 17 bateaux-boeufs engagés manœuvrèrent avec une certaine confusion. Les mourres de porc et les catalanes s'élancèrent avec ensemble vers le nord-est pour doubler les bouées au large.
Après une heure et demi de course, les régates étaient finies. Le Messager du Midi ne nous indique pas ceux qui s'y étaient distingués. Le même journal, dévoué à l'Empire, s'inquiétera d'une rumeur visant à célébrer la proclamation de la République, le 4 septembre 1870, par des jeux nautiques en remplacement des fêtes de la Saint Louis. Il rend compte du concours d'orphéon, de la fête vénitienne, mais ne signale pas de régates de 1871 à 1873.
C'est en 1874 qu'elles reprennent, marquées par un naufrage et le brouillard. La société nautique poursuivra néanmoins son activité, interrompue par la Grande Guerre. Après le premier conflit mondial, les yachtmen seront au rendez-vous.
Hervé Le Blanche