À 31 ans, Camille Fourré traite le sujet de la paralysie cérébrale dans son livre Un enfant (pas) comme les autres. Mère de Aaron atteint de ce handicap, autrice et militante, son parcours est teinté de courage, de résilience et de la volonté de faire passer un message fort.
Un parcours bouleversé par la maladie
Camille Fourré raconte un début de maternité marqué par un enchaînement d'événements tragiques. Après avoir quitté son travail pendant la pandémie de COVID-19 pour prendre soin de sa mère à Sète, malade d’un cancer, Camille découvre qu’elle est enceinte. Cependant, la joie de cette grossesse est rapidement ternie par une nouvelle dévastatrice : sa mère, après une décennie de stabilité dans sa maladie, apprend que son cancer est devenu incurable. « On évitait de parler du bébé, c’était un sujet tabou parce que ça nous projetait dans un futur incertain, où l'on ne savait pas comment les choses allaient se passer», témoigne-t-elle. Camille se retrouve ainsi confrontée à la douleur de perdre sa mère tout en accueillant une nouvelle vie.
« J'avais les deux personnes que j'aimais le plus au monde, ma mère et mon fils, dans des moments parallèles et je me suis totalement consacrée à ma mère. » Son fils, Aaron, naît quelques mois après le décès de sa grand-mère le 12 juillet 2021, dans des circonstances difficiles. Camille se retrouve hospitalisée à plusieurs reprises en raison d’une menace d’accouchement prématuré. Malgré des mois de lutte pour maintenir Aaron dans son ventre, il naît prématurément (8 mois), mais en bonne santé, ou du moins, c’est ce qu’elle croyait.
Le début d'une errance diagnostique
Le temps passe et, avec le regard d'une mère attentive, Camille commence à se poser des questions sur le développement de son enfant. À six mois, elle remarque qu’Aaron ne prend pas ses pieds, ne se retourne pas et ne met rien à la bouche. Mais, encore convaincue qu’il rattraperait son retard, elle est confortée par la minimisation des préoccupations faite par ses proches. Cependant, l’inquiétude persiste. C’est finalement après le premier anniversaire d’Aaron, alors qu'il n’a toujours pas développé certains réflexes moteurs, que les choses prennent une tournure plus inquiétante.
« À ce moment-là, le diagnostic de handicap est évoqué pour la première fois. C'était un coup de massue, un choc brutal », se souvient-elle. Cette annonce ouvre une nouvelle période d’incertitude. D’abord dans le déni, Camille finit par accepter l’idée qu’Aaron ne se développe pas comme les autres enfants. Elle se lance dans un parcours médical complexe, cherchant des réponses. Après des mois d’attente, des tests et des examens, elle apprend que son fils souffre de séquelles de leucomalacie périventriculaire, une forme de paralysie cérébrale, bien que ce terme ne soit pas immédiatement employé.
Un chemin de résilience
La période allant des premiers signaux inquiétants au diagnostic final, qui a duré près de deux ans, a été une rude épreuve émotionnelle. « L’ignorance, c’est le pire. On a commencé à être inquiets à ses 1 an et on a su qu’il avait une paralysie cérébrale vers ses 3 ans ». Camille, dans l’attente et l’incertitude, a passé des mois à chercher des réponses tout en étant confrontée à des réponses médicales évasives. Lorsque le terme *paralysie cérébrale* a été utilisé pour la première fois, un énorme soulagement s’est fait sentir. « Le plus difficile a été de ne pas savoir, de s’imaginer les pires scénarios. Quand j’ai enfin compris ce que c’était, j’ai réalisé qu’Aaron allait vivre, qu’il allait grandir et vieillir, et cela a été un immense soulagement », confie Camille.
L’autrice parle aussi du parcours de soins, des démarches administratives et de la difficulté de trouver des ressources adaptées à la paralysie cérébrale, première cause de handicap moteur de l’enfant, mal prise en charge en France. Cependant, dans ce long cheminement, Camille trouve une bouée de sauvetage : la Fondation Paralysie Cérébrale. Elle s'y engage pleinement pour sensibiliser à cette maladie et participer à la recherche de fonds.
L’écriture, un exutoire et un héritage
Le livre Un enfant (pas) comme les autres, publié le 12 mars 2025, est le fruit de son parcours, mais aussi de la volonté de partager son expérience. Camille a commencé à écrire après la naissance de son deuxième enfant lorsqu'Aaron avait deux ans. Le processus d’écriture s’est fait en parallèle du développement d'Aaron. Lors d'un premier jet, elle ne mentionne pas le handicap de son fils. Lorsqu’elle le termine, elle se rend compte que la paralysie cérébrale doit absolument y trouver sa place. Elle réécrit alors son livre en y intégrant l’intégralité de ce qu’elle a vécu.
« C’est un hommage à ma mère, un cadeau pour mes enfants, mais aussi un moyen de partager un message de solidarité pour les familles confrontées au handicap. » À travers son récit, Camille veut démontrer que la vie, même avec un handicap, ne doit pas être vue sous le prisme de la tristesse et du désespoir. Au contraire, elle choisit d’apporter de l’humour et de l’auto-dérision à son histoire. Pour elle, l’humour est un outil de résilience, une manière de se défendre contre la dureté de l’existence. « Je fais 1m47. J’ai toujours eu un second degré envers ma petite taille. Je veux absolument enseigner à mes enfants cette autodérision car c’est le plus beau des boucliers. »
Sensibilisation et engagement
L’engagement de Camille Fourré ne s’arrête pas à l’écriture de son livre. Elle est devenue ambassadrice du grand challenge SEPTember organisé par la Fondation Paralysie Cérébrale, qui récolte des fonds pour la recherche sur la détection précoce de la paralysie cérébrale et pour aider les familles à mieux vivre avec ce handicap. « C’est la seule fondation en France aujourd'hui à soutenir la paralysie cérébrale financièrement et qui ne reçoit aucun soutient de la part des pouvoirs publics. »
Un futur rayonnant
Aujourd’hui, avec un livre publié et un engagement qui ne cesse de croître, Camille Fourré a des projets plein la tête. Elle envisage d’écrire un second livre, mais pour l'instant, elle savoure pleinement le fait d’avoir accompli ce rêve éveillé. Son engagement auprès des familles d’enfants handicapés ne faiblit pas, et elle poursuit son travail avec la Fondation pour faire avancer la cause de la paralysie cérébrale en France.
Dans les mots de Camille, on retrouve une philosophie de vie essentielle de Sénèque : « La vie, ce n’est pas d’attendre que l’orage passe, mais de danser sous la pluie. » Une vision optimiste, humaniste et résolument tournée vers l’avenir.
La fondation Paralysie Cérébrale : https://fondationparalysiecerebrale.org/
Le livre Un enfant (pas) comme les autres de Camille Fourré est disponible en librairie depuis le 12 mars 2025.
Juliette Amey
(Photo ©Camille Fourré)