Alzheimer : une lumière au bout du tunnel avec le lecanemab

Un espoir concret vient d’émerger dans la lutte contre la maladie d’Alzheimer. Après des années d’impasses thérapeutiques, un médicament baptisé lecanemab – nom commercial Leqembi – vient d’être autorisé sur le marché européen. Un tournant historique, salué comme “la première lumière au bout du tunnel” par Jean-Luc Angélis, directeur de la Fondation Recherche Alzheimer.

« Le lecanemab est un médicament qui traite les patients atteints d’Alzheimer, mais uniquement s’ils sont détectés très tôt », explique Jean-Luc Angélis. Et pour cause : la maladie s’installe silencieusement dans le cerveau jusqu’à 15 à 20 ans avant les premiers signes visibles, comme des pertes de mémoire ou une désorientation. Le médicament agit sur l’une des deux protéines responsables de la maladie : la bêta-amyloïde.

Ce traitement, un anticorps monoclonal commercialisé sous le nom de Leqembi, « va dans le cerveau pour nettoyer les protéines bêta-amyloïdes, qui forment des plaques séniles et étouffent les neurones », explique-t-il. Ces plaques endommagent peu à peu les tissus cérébraux. Le cerveau compense un temps, mais finit par céder. « Ce médicament vient donc nettoyer les plaques et ralentir significativement le déclin cognitif. »

Un parcours réglementaire semé d’embûches

Le chemin vers l’autorisation de mise sur le marché n’a pas été simple. « Il y a eu d’abord un refus en juillet 2024, puis un accord favorable en novembre, une nouvelle évaluation en janvier, et enfin une décision positive en avril 2025 », retrace t'il. Ce n’est donc que très récemment que le feu vert européen a été donné.

Mais ce traitement ne guérit pas. Il ralentit. Et c’est déjà beaucoup. « C’est un grand espoir. Si l’on pouvait ralentir la maladie de cinq ans en la prenant en charge immédiatement, on diviserait par deux la population Alzheimer en France. »

Des résultats encourageants, mais pas sans risques

Dans les essais cliniques, le médicament a montré une réduction de 25 à 30 % du déclin cognitif. Les patients traités conservent mieux leurs capacités que ceux sous placebo. Mais cela ne s’accompagne pas sans vigilance : « Il existe un risque de micro-hémorragies et d’œdèmes cérébraux, en particulier chez les personnes porteuses du gène ApoE4 ou sous anticoagulants. Ces patients doivent être suivis de très près. » Et ce traitement n’est pas simple à administrer : « Il faut se déplacer tous les quinze jours dans un centre de soins pour une injection. »

Un défi logistique pour le système de santé en France

« Ce médicament coûte entre 25 000 et 27 000 euros par an », rappelle Jean-Luc Angélis. Avant qu’il soit disponible, la question du remboursement devra être tranchée. Autre enjeu : l’organisation des soins. « Les consultations mémoire sont déjà saturées. Il faut à la fois traiter le flux actuel et absorber un nouveau flux de patients à suivre. »

Les Centres Mémoire de Ressources et de Recherche se préparent. Mais le secteur hospitalier est sous tension. « Il va y avoir un vrai sujet de personnel. La détection précoce en amont, et l’administration des soins en aval, vont nécessiter de sérieuses adaptations. »

Un tournant historique dans la recherche

Pour Jean-Luc Angélis, c’est un moment historique. « Pour la première fois, on a un médicament qui a des effets réels sur la maladie d’Alzheimer. C’est la lumière au bout du tunnel. » Le professeur Lars Landfeld, à l’origine du médicament, travaille déjà sur une version optimisée, plus efficace, avec moins d’effets indésirables. Et ce n’est qu’un début : « Dès qu’on trouve un premier traitement, on ouvre la voie à d’autres stratégies thérapeutiques. » Un nouveau cycle de recherche s’annonce. « La génération de nos enfants bénéficiera de traitements bien plus efficaces. »

Mais il alerte : « La recherche sur Alzheimer concentre 20 fois moins de moyens que celle sur le cancer. » Il appelle les pouvoirs publics à ne pas se contenter de déclarations d’intention. « On attend une vraie feuille de route stratégique pour Alzheimer, pas juste des recommandations sans budget. »

La sortie du lecanemab marque un tournant. Non pas une révolution immédiate, mais une avancée décisive dans la compréhension et la prise en charge de la maladie d’Alzheimer. Pour Jean-Luc Angélis, « dans une société vieillissante, ne pas agir face à Alzheimer, c’est s’exposer à un tsunami. »

Juliette Amey

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