Par une douce soirée d’été, ce mercredi 23 juillet à 21h30, le Théâtre de la Mer s’est transformé en écrin pour la poésie vivante, vibrante, engagée. En soutien au festival Les Voix Vives, trois artistes d’exception se sont succédé sur scène, offrant un moment suspendu entre mots, musique et émotion.
La soirée s’ouvre avec Michel Arbatz, fidèle du festival, qui revient cette année avec un hommage passionné à Jacques Prévert, accompagné au piano par Sophie Grattard. Mais attention : ici, pas de "Prévert pour enfants sages". Arbatz nous dévoile un Prévert rugueux, acerbe, profondément politique, loin des clichés d’école. « Il y a un Prévert qu’on cache à l’école. Celui qu’on apprend est un peu fleur bleue. Moi, j’ai voulu montrer celui qui n’a pas peur de mettre les mains dans le cambouis de l’âme humaine. » raconte Michel Arbatz.
Le public rit, s’étonne, découvre. Et à la fin, l’ovation est unanime. Beaucoup confieront après coup n’avoir jamais entendu ce Prévert-là. Pari gagné pour Arbatz, qui conclut en rappelant que la poésie « n’est pas faite pour être lue, mais pour être écoutée. »
Laurence Vielle, souffle poétique entre Duras et transe sonore
Place ensuite à Laurence Vielle, poétesse, diseuse belge. Une performance habitée, entre poésie vivante et mémoire sonore, en dialogue avec la voix de Marguerite Duras. « J’ai épluché les archives sonores de Duras, pour en faire surgir une pensée visionnaire, à la fois sombre et pleine d’espoir. Elle dit que dans un monde qui s’écroule, peut naître enfin un espace commun à réinventer ensemble. » – Laurence Vielle
Accompagnée de trois musiciens et d’une « spatialisatrice sonore », Laurence Vielle compose un objet poétique unique, tissé d’improvisations, de mots puissants, et de textures sonores qui enveloppent le Théâtre de la Mer. « En poésie de chez nous, faites la fête au mot pour devenir illimité. » – Laurence Vielle, citant Jean-Pierre Verheggen
Son émotion est palpable. Et son engagement aussi : « Cette soirée était vitale. Je souhaite de tout cœur que cette aventure continue. Grâce à ce festival, notre ciel est plus bleu. »
Diego la Onda, un rêve réalisé avec Brassens
Enfin, Diego la Onda clôture la soirée en beauté avec un répertoire vibrant de Georges Brassens. Hommage sincère, tout en simplicité et en générosité, dans la ville même du poète. « Tout le monde a une petite Madeleine avec Brassens. Moi, c’est lui qui m’a ouvert les portes du Théâtre de la Mer. J’avais dit, il y a 10 ans, à ma fille de 3 ans : Un jour, je jouerai ici. Et voilà, c’était hier soir », explique avec joie Diego la Onda.
Sa version de La Madeleine de Sète Georges Brassens émeut, touche juste, et résonne avec une douceur toute particulière sur cette scène. « Ce lieu est magique. Le public était attentif. Une extrême sympathie de toute l’équipe, une énergie magnifique. Alors j'airais un mot pour le festival, encore ! », conclut Diego la Onda.
Un Théâtre de la Mer conquis, une poésie vivante et nécessaire
Ce concert de soutien a rappelé à tous la richesse et la nécessité du festival Les Voix Vives, menacé aujourd’hui par des difficultés financières.
« Ce festival, je ne me suis même pas demandé si je devais le soutenir. C’était une évidence. Il n’y a pas beaucoup de festivals de poésie de cette ampleur en France. » – Michel Arbatz
« Il y a ici un vivier de beauté, de poètes, de poésies très différentes. Chacun y trouve sa place. C’est une résistance joyeuse dans un monde qui semble parfois gris. » – Laurence Vielle
« Encore, encore… Ce festival doit continuer. » – Diego la Onda
Dans une époque où la poésie semble marginalisée, ce genre de soirée démontre avec éclat qu’elle est plus que jamais essentielle. Au Théâtre de la Mer, les voix se sont élevées pour la beauté, pour la liberté, pour l’humain. Et si, comme le disait l’un des artistes, grâce à ce qui se passe ici, notre ciel est plus bleu, alors soutenons ce festival pour que la lumière continue de briller, chaque été, à Sète.
Juliette Amey