L'activité économique de Sète, avant la première guerre mondiale, dépend en grande partie du liquide célébré par Dionysos (Bacchus), le vin. Après 1892, le port en est devenu importateur et l'économie de la ville tourne surtout autour de cette activité. Activité qui met la ville en contact avec de lointains pays.
Selon la brochure du syndicat d'initiative éditée en 1913, 19 pays sont représentés à Sète à cette date. Si nous ignorons quelles affaires pouvaient traiter les représentants de l'Uruguay et du Vénézuela, grâce à l'Histoire de Sète (Privat 1988) nous savons que Sète importait des nitrates du Chili, nécessaire à l'industrie chimique pour l'agriculture. Il est probable que l'on importait des céréales d'Argentine et l'on vendait vin, futailles et produits chimiques au Brésil. Argentine et Brésil sont desservis par la Société générale de Transport maritimes qui leur apporte du charbon anglais et français. Sète exporte les charbons de Carmaux, La Grand Combe, Decazeville.
On envoie aussi au Brésil du sel et probablement les vins liquoreux du Languedoc. Pour la liaison avec les pays d'Asie, il existait les paquebots de la "ligne du tour du monde" par la Compagnie des Chargeurs réunis, représentée à Sète par MM. W. Bazin et E. Laune. Elle desservait Colombo, Bangkok, Saïgon, Haïphong, Tourane. Et la compagnie marseillaise de navigation à vapeur, Fraissinet et Compagnie, desservait Marseille, Nice, la Corse, l'Italie, la Grèce, la Turquie, le Danube et la côte occidentale de l'Afrique.
Mais il est des sociétés plus discrètes qui assurent un trafic plus rémunérateur, celui du vin. J. Marmies, succeseur de J. Lavabre, importe toujours du muscat de Samos (malgré les tarifs douaniers de 1892), des vins d'Espagne (malgré le même motif) tels que Malaga, Xerès. Et des vins d'Algérie. Telles sont aussi les activités de la société de César Souchon et celle d'Axel Busk (Sète-Algérie, parallèlement à Sète-Baltique). Car les importations de vins d'Algérie ont pris leur essor depuis les années 1880 et la crise du phylloxera. Elles sont passées, de 65 000 hl en moyenne de 1873 à 1888, à 649 000 hl en moyenne de 1899 à 1914. Grâce à un tarif préférentiel de la Compagnie de chemin de fer du PLM, le vin est revendu en France, en particulier dans la région parisienne. En effet, tandis que le phylloxera détruisait le vignoble, la demande se maintenait. Et le négoce sétois s'est tourné vers l'Algérie, surtout après la mise en place de tarifs douaniers limitant le trafic avec l'Espagne et l'Italie. Les relations se poursuivent avec ces deux pays où, à part du vin, on va chercher du minerai de fer (essai de sidérurgie de Thau par la société Schneider). Plusieurs agences commerciales continuent le commerce du vin, dont celle de Pedro Pi Suñer, 6 quai de Bosc, qui importe Madère, Malaga, muscats.
Ainsi, après une reconversion due à l'application de tarifs douaniers protectionnistes, le vin en 1913 contribue à la fortune de Cette. Par son commerce et les activités qu'il peut engendrer qui font de la ville-port une place économique active.
Hervé Le Blanche