Evoquer Cette, la "ville-port".

 

Si l'Histoire est l'évocation du passé, il y a bien des façons de "faire de l'Histoire". L'ouvrage, "Jours de Cette" dû à la collaboration de François Mottier pour le texte et Jean Brunelin pour l'iconographie, en est un exemple (éd. L'An Demain, 5 quai d'Alger, Sète).

En effet, avec la correspondance supposée d'un jeune commis négociant suisse, Baptistin Vulliez, c'est Cette d'avant la Grande Guerre qui est évoquée.

 

Jean Brunelin, dans la préface, brosse le décor des épisodes qui seront présentés. A la charnière de la dépression économique des années 1870 et alors que s'amorce la Belle Epoque, "… L'abondance nouvelle viendra évidemment de la mer, car Cette est une ville-port, un port dans une ville où les bateaux sont dans la rue et la mer toujours à portée de regard". Cette, avec les canaux baignant les pieds de la "collinette" de Saint Clair, sera surnommée la "Venisette" par le citoyen du canton de Vaud.

Et le natif de Clarens (sur la riviera genevoise) aurait été sensible, dès l'abord, à la lumière qui éblouit sa prunelle, même en octobre avant qu'il n'en apprécie tout l'éclat (nécessitant le port de verres colorés) au mois de juin. Voilà qui est bien vu, mais on peut être déçu que notre Helvète soit muet sur la douceur du climat en général. Il est vrai qu'il avait tant à voir et à dire.

Aussi ne fait-il que signaler en une occurrence les quais "bruts et décharnés", très professionnels avec pour certains "de vastes alignements de futailles parmi lesquels évoluent gens et véhicules". Mais en dehors du négoce, le milieu marin impose ses contraintes générant parfois difficultés et épisodes dramatiques.

 Ainsi le steamer Anaïs-C fit naufrage en janvier 1895 au large de Marseille. Parmi les 13 disparus, on compte un citoyen de Frontignan et le mousse Honoré Xiffre, 14 ans. Et comme nombre de Cettois sont inscrits maritimes, lorsque la soute à poudre du cuirassé Iena explose à Toulon, on déplore 2 victimes cettoises à qui on fera des funérailles solennelles.

Et puis, le 25 octobre 1898 : "Pandémonium, capitale des Enfers, a ouvert ses portes…". Baptistin Vulliez considère "la scène dantesque d'un navire d'un seul coup enflammé, son pont entier lancé dans les airs, puis retombant dans l'hideux fracas que feraient les os brisés d'un Titan". Le tocsin sonne, on accourt de toutes parts. Le brick goélette Tomase Padre, chargé de fûts de pétrole, est en feu. L'incendie menace les navires voisins également chargés de fûts de pétrole. Le Tomase Padre fut extrait du port par le navire pilote le Vigilant et remorqué jusqu'à la plage de Frontignan. Les pêcheurs quant à eux connaissaient des difficultés : on s'inquiétait déjà de la baisse de la ressource et un vieux sage préconisait la fermeture de la pêche à certaines époques, comme il existe la fermeture de la chasse.

 

Voilà une agréable plongée dans le passé, guidée par un style un peu naïf et apprêté (Baptistin est jeune), présentant parfois de belles envolées, comme pour le phare de Saint Clair, "Polyphème de la mer"

Hervé Le Blanche

 

Pour en savoir plus :https://www.landemain.fr/regionalisme/sete-bassin-de-thau/jours-de-cette

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