Le 4 avril, le Musée de la Mer à Sète a été le théâtre d'une inauguration exceptionnelle, où deux anciennes bornes d’amarrage en fonte, récemment sauvées des eaux, ont été dévoilées au public. Ces vestiges, désormais exposés, enrichissent le patrimoine maritime de la ville. Né d'une rencontre imprévue, ce projet inattendu a permis de conserver un fragment méconnu mais ô combien précieux de l’histoire maritime locale.
L’histoire de ce sauvetage commence lors des travaux d'agrandissement du dock Richelieu de Sète, dans le cadre de l’arrivée de la nouvelle drague régionale Hydromer. Ces travaux ont nécessité l’élargissement et l’allongement du quai, ce qui a rendu inutiles les deux anciennes bornes d’amarrage en fonte, datant de plus d’un siècle. Destinées à la destruction, ces pièces historiques ont été sauvées in extremis grâce à l’initiative de Gustave Brugidou, président de la société historique et scientifique de Sète, et à l’engagement de plusieurs acteurs locaux.
"On a eu la chance de visiter le chantier. En partant, un ami m’a dit : 'Et si on les récupérait ?'. C'est de cette idée qu'a germé tout le projet", raconte Gustave Brugidou. En effet, une mobilisation collective s'est mise en place : un ingénieur à la région, ainsi que des techniciens, agents de la Ville, et des passionnés ont uni leurs forces pour sauver, restaurer et exposer ces deux bittes d’amarrage.
Malgré l'absence de budget, l'initiative a rassemblé les bonnes volontés. Les deux bornes, pesant plusieurs tonnes, ont été extraites du béton cyclopéen qui les enserrait à l’aide d’un brise-roche. Si certains dégâts ont été causés durant l’opération, notamment à la partie inférieure des bornes, le sauvetage a permis de redécouvrir la morphologie complète de ces objets, jusque-là méconnue des historiens. Une partie, la "colorette" basse, enfouie sous le béton, a ainsi été mise en lumière grâce à cette restauration.
"Ce projet d’exposition nous a permis de découvrir la véritable morphologie de ces bittes d’amarrage", explique-t-il. "Nous ne savions pas que la partie enterrée, environ 1,50 m, existait. La 'colorette' inférieure était totalement inconnue. C’est une véritable redécouverte historique."
Un travail de mémoire, mais aussi un geste pour l’avenir
Ce projet de sauvetage ne se limite pas à la préservation de deux objets historiques : il représente également un geste symbolique pour le patrimoine maritime de Sète. En effet, les bornes exposées au Musée de la Mer illustrent l’histoire technique du port de Sète. Installées à partir de 1840, les premières bornes en basalte ont été progressivement remplacées par des bittes en fonte, comme celles récupérées aujourd’hui, lors de modifications du quai Richelieu entre 1889 et 1890.
"Les bornes exposées aujourd’hui nous racontent l’histoire du port de Sète et du savoir-faire industriel ancien", précise Gustave Brugidou. "Ces objets témoignent d’une époque révolue, où chaque détail était pensé pour répondre aux besoins du port. Les fonderies du Midi, installées à pas très loin d’ici, ont fabriqué ces bittes d’amarrage, qui étaient ensuite intégrées dans le béton cyclopéen du quai."
Un événement de partage et de gratitude
L'inauguration de ce jeudi soir a été l’occasion de partager un moment de remerciement envers toutes les personnes impliquées dans le projet. Gustave Brugidou n'a pas oublié de remercier tous les partenaires et bénévoles, ainsi que les élus et représentants de la Région. "C’est un beau geste pour notre patrimoine et une fierté collective."
Les deux bornes en fonte, désormais visibles au Musée de la Mer de Sète, ont été accompagnées d’un panneau explicatif retraçant l’histoire de ces objets, ainsi que leur rôle fondamental dans l’évolution du port. Une belle manière de préserver la mémoire tout en offrant aux générations futures la chance de découvrir cet héritage maritime. Grâce à la Société d'études historiques et scientifiques de Sète, ces vestiges du passé continueront à raconter l’histoire du port sétois pour les années à venir.