Sette 1786, port dans l'enfance ?

Voilier, Bateau, Mer, Océan, Naviguer

C'est ce qu'affirme le subdélégué Jean Matthieu Grangent dans son rapport à l'Intendant en 1786. Il évoque les causes de l' "engourdissement du commerce de Sette", tout en décrivant le trafic du port. Celui-ci n'est pas dépourvu d'activités, mais plus centrées sur la Méditerranée.

Et le notable de Sette étaye sa démonstration : le port a plus de cent ans d'existence, "il a dans son voisinage les villes de Montpellier et de Nîmes qui sont aussi riches que commerçantes". L'agglomération ne regroupe que 8 000 habitants alors que le port est "pour ainsi dire le seul de la province de Languedoc". JM Grangent force le trait car son évocation du port de Sette passe aussi par le rôle de la ville rivale, Agde. Il déplore que le canal de Riquet se termine à Agde. Il y revient plusieurs fois dans son rapport. Car, pour gagner Sette, il faut affronter l'étang de Thau et ses forts coups de vent. Et la "ville noire" (Agde), malgré les défauts de son site (ensablement de la "rivière", barre à l'estuaire), est une vraie concurrente pour Sette.

C'est en grande partie par ce port que s'exportent les grains du Haut Languedoc (Aude, Tarn, Tarn et Garonne) en direction de la Provence (qui crie souvent famine) ou du Levant. Selon JM Grangent, Sette n'en exporte qu'une partie, ainsi que des grains du Languedoc quand les circonstances s'y prêtent. De plus : "on embarque préférablement au dit Sette, les grains et légumes venant du côté de la Bourgogne, du Lyonnois, du Vivarais et des Cévennes lorsque les récoltes abondantes dans ces cantons permettent qu'il en soit fait alors des envois à l'étranger".

Sette devait être, dans l'esprit de ses créateurs, "l'épanchoir des produits de la province". Et c'est l'échec majeur de la ville-port. Certes, en 1786, elle exporte de la petite lingerie : bonnets, mouchoirs, bas. Au milieu du siècle, l'empire espagnol sembla s'ouvrir aux bas de soie languedociens. On voyait déjà ce produit habillant les classes aisées de Rio à Mexico. Les aléas de la politique en décidèrent autrement. Mais, en ce qui concerne la draperie, jusqu'après la Révolution, Sette se heurtera au monopole de Marseille dans le commerce avec le Levant. Le produit des manufactures languedociennes et du travail paysan d'hiver ne s'exportera pas par Sette.00

Par contre, le port, pour alimenter l'industrie textile, importe de grandes quantités "de laines, coton et teinture", à côté des "drogueries et épiceries" (poivre, cannelle de Hollande), huiles d'Italie avec le tabac de Virginie pour la manufacture de Sette. Le port exporte les produits agricoles de la province : légumes, huile, amandes et même ce qui pose parfois problème, des grains. Tout cela, en plus du commerce du sel et du vin, entretient toute une activité de cabotage de l'Espagne à l'Italie. Selon le subdélégué, 800 petits navires s'activent à ce trafic. Ainsi, compte tenu des ambitions initiales, Sette stagnait.

Pourtant, une certaine expansion était maintenue par des activités plus modestes. Au total, à la fin du XVIIIè siècle, Sette exporte plus qu'elle n'importe et gagne en moyenne plus de 100 habitants par an.

Hervé Le Blanche