Voir les photos sur https://www.ville-marseillan.fr/blog/2023/09/11/emergence-de-la-ponte-de-tortues-caouanne-a-marseillan-herault/

 En juillet, une ponte de tortue Caouanne se déroulait sur la plage de Marseillan. Ce dimanche 10 septembre vers 22h00, les œufs du nid ont éclos après 63 jours d’  incubation et une soixantaine de bébés tortues ont rejoint la mer. Cet évènement reste rarissime sur le littoral méditerranéen français même si cette année celui-ci a été l’objet d’un phénomène exceptionnel avec 11 sites de nidification de tortues Caouanne observés. 

Le moment était très attendu depuis l’observation d’une ponte de tortue marine sur la plage de Marseillan dans la nuit du 9 au 10 juillet 2023. Le nid, protégé depuis sa découverte, était scruté de près par les spécialistes depuis plusieurs semaines. Le jour J est enfin arrivé dans la soirée sous les yeux émerveillés du public présent.

L’éclosion et la course vers la mer

A l’aide de leur dent d’éclosion, petite protubérance placée sur le haut du bec appelée aussi diamant, les petites tortues, mesurant moins de 5 cm et pesant environ 25 g, percent la membrane de l’œuf, c’est le début de l’éclosion. Ensemble et dans un mouvement hélicoïdal, les tortillons progressent vers la surface, attendant la température idéale pour s’extraire du sable et réaliser leur course vers la mer.

La durée d’incubation de la ponte d’une tortue Caouanne se situe habituellement entre 40 et 80 jours (la moyenne étant de 55 jours). Celle-ci est intervenue après 63 jours d’incubation.

Une partie des œufs pondus a éclos et une soixantaine de bébés tortues ont émergé du sable pour rejoindre la mer toute proche. Il peut encore s’écouler plusieurs jours avant que l’ensemble des tortillons ne sortent du nid.

La référente locale du Réseau Tortue Marine de Méditerranée française (RTMMF) était présente sur place pour gérer et superviser cette phase délicate.

 

11 pontes entre les mois de juin et août 2023 : une mobilisation exceptionnelle pour un phénomène exceptionnel

Le 21 juin 2023 une tortue caouanne est venue pondre sur la plage de la bergerie à Hyères. Début juillet 2023, des pontes de tortues Caouanne ont d’abord été observées à Villeneuve-Loubet dans les Alpes-Maritimes, puis à Marseillan (Hérault), sur l’île de Porquerolles (Var), Sète (Hérault), et de nouveau dans le Var à Saint-Cyr-sur-Mer, Fréjus-Plage et sur la plage de la Capte (commune de Hyères). 3 pontes ont été ensuite enregistrées en août sur les plages de Pietracorbara et Ajaccio en Corse

La présence de 11 sites de nidification sur les côtes méditerranéennes françaises en une seule année est exceptionnelle.

Fort des expériences de 2016 (Saint-Aygulf), 2018 (Villeneuve-Lès-Maguelone), 2020 (Fréjus) et 2022 (Valras), le protocole de protection des nids a pu être rapidement déployé par le RTMMF et ses partenaires. Ainsi, tous les acteurs concernés se sont mobilisés efficacement pour chaque épisode de pontes : l’Office français de la biodiversité (OFB), l’Observatoire des Tortues Marines (OTM) porté par le Muséum National d’Histoire Naturelle (MNHN), le Réseau Tortues Marines de Méditerranée Française (RTMMF) – commission de la Société herpétologique de France (SHF), le programme européen Life TURTLENEST et selon les sites de pontes, les communes et communautés d’agglomération concernées, les parcs nationaux (Port-Cros, Calanques), le Centre de Réhabilitation de la Faune Sauvage (Association Marineland) pour la région PACA et le Centre d’Etude et de Sauvegarde des Tortues Marines (CestMed) pour l’Occitanie.

Un guide d’intervention, coordonné par le Ministère en charge de la Transition écologique et préparé par le MNHN, le RTMMF, l’OFB et leurs partenaires, précise clairement « qui fait quoi ».

A chaque alerte, des observateurs du Réseau RTMMF se rendent sur place dès le matin pour confirmer la présence d’œufs dans le nid et l’espèce concernée : tortue Caouanne (Caretta caretta) dans les 7 cas. Pour chaque ponte, les énergies se mobilisent (services techniques et policiers municipaux, agents des parcs nationaux et des communautés d’agglomération) pour mettre en place des barrières matérialisant un périmètre de protection stricte du site, pour prendre des arrêtés municipaux de protection du périmètre, assurer des rondes de surveillance et mettre à disposition le matériel nécessaire pour la sécurisation du public. Des panneaux d’information et de sensibilisation sur l’évènement ont également été installés sur chacun des 6 sites.

Mieux comprendre ce phénomène jusqu’ici rarissime

Des instruments de suivi de température sont mis en place afin de collecter des données scientifiques pendant la période d’incubation afin de mieux comprendre ce phénomène.

Si les eaux de Méditerranée occidentale sont connues pour être un habitat privilégié des tortues immatures et sub-adultes, l’OTM constate depuis peu une activité de reproduction plus régulière sur le littoral méditerranéen français, tendance également observée en Italie et en Espagne depuis une dizaine d’années. Les raisons de ce phénomène récent interrogent les scientifiques : les nids déposés en Méditerranée occidentale sont-ils viables ? La température du sable est-elle suffisante ? Certaines tortues marines seraient- elles en train de coloniser de nouveaux habitats de ponte ? Est-ce dû à une hausse de la température de l’eau ? une modification des courants ou l’évolution naturelle des habitats de nidification ? Les efforts de protection réalisés depuis des dizaines d’années en Grèce et en Turquie (d’où proviennent majoritairement les tortues qui fréquentent nos côtes) jouent-ils un rôle ?

Laisser faire la nature, ne pas déranger

La règlementation française interdit toute perturbation intentionnelle (manipulation, nuisance lumineuse…) de ces espèces protégées. Aussi, il est très important de respecter certaines règles :

  • Respecter une distance de 10 mètres ;
  • Eteindre toutes les sources de lumière artificielle ;
  • Ne pas photographier les tortues avec un flash ;
  • Ne pas toucher les tortues et les œufs.

La saison de ponte des tortues Caouanne s’étale généralement de juin à mi-août. Durant toute cette période, elles fréquentent nos plages, le plus souvent la nuit, afin d’y déposer leurs œufs. Cette espèce a une maturité sexuelle tardive (autour de 30 ans) et se reproduit tous les 2 à 4 ans. La taille adulte varie de 90 cm à 1 mètre, pour un poids moyen de l’ordre de 135 kg.

Les tortues marines, des espèces protégées

En France, toutes les espèces de tortues marines sont protégées. Cela signifie que pour intervenir sur une tortue marine, même en difficulté, il faut être habilité, disposer d’une dérogation délivrée par les autorités compétentes dans le cadre d’un programme scientifique validé par le Conseil National pour la Protection de la Nature.

Les tortues Caouanne et les six autres espèces de tortues marines présentes dans les mers et océans du monde sont toutes inscrites sur la liste rouge des espèces menacées de l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature).

En savoir plus

La thématique tortue de mer est gérée par les correspondants des réseaux d’échouage et de d’observation (le RTMMF pour la façade méditerranéenne). Ceux-ci sont soient bénévoles, professionnels, associatifs (centres de soins CESTMed, CRFS de l’Association Marineland…), ou encore agents institutionnels présents par essence sur le littoral (Office Français de la Biodiversité, Conservatoire du Littoral, etc.).

Ce réseau d’acteurs permet de collecter des données sur les tortues marines de Méditerranée, de surveiller l’état de ces populations, de sensibiliser le grand public et de soigner les tortues en difficulté dans les centres de soins habilités en Méditerranée française : le CESTMed à La Grande Motte (34) et le Centre de Réhabilitation de la Faune Sauvage (CRFS) de l’Association Marineland à Antibes (06). Depuis peu, la surveillance des activités de reproduction et des pontes s’ajoute à ces missions essentielles.

Le CESTMed, qui intervient dans un secteur doté de plages de sable adaptées à la ponte des tortues marines, développe depuis 2018 avec l’appui de la DREAL Occitanie, une campagne de prospection des plages, à la recherche de traces attestant de la simple montée d’une tortue marine, d’une ponte ou encore d’une émergence. L’association est aussi la première en France à avoir testé les chiens renifleurs pour aider à trouver les nids. Des prospections de plages à Fréjus – à pied et par drone – à la recherche d’éventuelles traces de tortues marines sont également menées depuis 2 ans par des bénévoles de l’Association Marineland avec l’aide de la ville de Fréjus et d’Esterel Côte d’Azur Agglomération.