Les corsaires du Premier Empire, à Sète

 Bateau, Nature, Natu, Étoile Du Roy, Mer

 

ILLUSTRATION

 

Il y a plus d'une décennie à présent, les passionnés d'histoire et de patrimoine maritime de Sète agitaient l'idée de reconstruire à l'identique, comme pour l'Hermione, le deux mâts sétois La Comtesse Emeriau. C'est le navire corsaire armé à Sète qui s'est le plus illustré dans la guerre de course sous le Premier Empire, mais qui connut une fin peu glorieuse.

 

Avec la reprise de la guerre contre l'Angleterre (1802) et l'Espagne (1805), Sète est dans une situation difficile. La ville reste un objectif militaire et d'autre part, alors que les britanniques dominent la Méditerranée, le commerce et la pêche périclitent. Certains marchands et négociants déplacent le siège de leur activité plus à l'intérieur, à Montpellier, Béziers ou Pézenas. D'autres hommes d'affaire vont s'efforcer de relever les défis lancés à la communauté par ces temps difficiles. La compagnie Ratyé-Bresson arme des navires pour la guerre de course : Général Cosmao, La Comtesse de Montebello, le Décidé et La Comtesse Emeriau, lancé en 1810. Ce nom est celui de la femme du préfet maritime de Toulon protégeant le capitaine Ytier de Martigues, commandant du bord.

On recrute des matelots à Sète, mais aussi Agde, Montpellier, Marseillan. Ainsi, en 1821 se maria à Marseillan le fils de Jean Fayet, matelot sur le navire corsaire. Au total, 118 marins bien décidés à user des haches, sabres, pistolets en leur possession. L'armement lourd ne comprenait que cinq caronades (canons de fonte orientables).

 

Cela n'empêcha pas le corsaire de s'illustrer. Le 18 septembre 1809, au large des Baléares, le navire sétois croise la route de deux trois mâts naviguant de conserve. Un espagnol, La Reine des deux Siciles, polacre de 200 tonneaux chargé de quinquina, salsepareille et cuirs. Bien qu'armé de 20 canons, le navire fut pris. L'autre vaisseau était le Harvey, magnifique trois mâts transportant, de Marseille à Palerme, draperies, mousselines et autres marchandises.

Il fut capturé à son tour. La vente de chaque prise rapporta la belle somme de 200 000 Francs. Et La Comtesse Emeriau écumait les routes maritimes méditerranéennes. Ainsi, pour son dernier combat, le navire corsaire intercepte-t-il à 31 miles de Palerme (66,7km) un brick anglais, The Badger, qui avait conduit à Minorque des prisonniers français et se dirigeait vers le sud de la Sardaigne. Le combat s'engage. Pendant près de deux heures, canons et mousqueterie se déchaînent. Mais le capitaine français commet semble-t-il une erreur de manœuvre. En tentant de remonter au vent, le navire chavire. Seulement 14 des 110 hommes d'équipage seront sauvés.

 

Seuls, des passionnés comme Louis Paul Blanc en son temps (conférence à la MJCen 1971) ou plus récemment M. Golf de Marseillan (traduction du journal de bord du Badger) ont évoqué le souvenir des exploits de La Comtesse Emeriau. Une partie de la mémoire de la ville de Sète s'efface peu à peu. A moins que...

HERVE LE BLANCHE