Sète, port du vin dans le dernier quart du XIXè siècle

Sète, port du vin.

Dans le dernier quart du XIXè siècle, le dynamisme de l'agglomération sétoise ralentit. Certes, sa population a augmenté de 15 % entre 1876 et 1911, mais entre 1891 et 1896 la population a régressé. Car la ville-port a connu un évènement majeur dans les années 1880 : elle est devenue importatrice de vin.

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Les conséquences de la crise du phylloxéra ont fait de Sète le port du vin, évolution spectaculaire, mais débouchant sur d'importantes fragilités. Jean Sagnes (Histoire de Sète, Privat, 1987) souligne que "le phylloxéra détruit le vignoble et provoque la chute de production de vin français tandis que les besoins au niveau de la consommation demeurent". Sète ne peut plus exporter, mais a les moyens d'acheter du vin à l'étranger afin de le revendre sur le marché français. A partir de 1878, les "exportations se réduisent et les importations s'envolent". La baisse des exportations est due à des causes multiples.

La crise de production a renchéri le produit, de surcroît frappé de lourds droits de douane (plus de 100 % en Russie, 50 % en Allemagne). A l'étranger, on développe des vignobles, comme en Argentine. Et en Algérie, la production quadruple de 1878 à 1889. On acheta, pour alimenter le marché, des vins grecs, portugais, algériens et même, paraît-il, turcs (Bessière, BSH, 1991). Mais dans un premier temps, on eu recourt surtout à des vins espagnols.

Sète devint une des portes d'entrée des vins espagnols à destination de la région parisienne et du nord-est de la France. Ce trafic est facilité par le tarif consenti par la compagnie PLM : 28,50 F la tonne, contre 39,70 aux vins français. On fait valoir à Sète la concurrence de la ligne maritime Espagne-Gibraltar-Rouen (25 F la tonne). Mais le négoce sétois est impuissant face à l'adoption de tarifs douaniers protectionnistes réclamés par les députés des régions viticoles. Pourtant, en se tournant de plus en plus vers les vins d'Algérie, on peut tourner la loi protectionniste de 1895. Et les importations algériennes prennent un essor sans précédent quand, en 1899, est adopté un tarif douanier encore plus protectionniste.

De 65 000 hl de moyenne annuelle de 1873 à 1888, on passe à 649 000 hl de moyenne annuelle de 1899 à 1914. Et la compagnie du PLM accompagne le mouvement en accordant aux vins d'Algérie un tarif préférentiel. Les ventes de vin dans le nord-est de la France se stabilisent à un niveau élevé, conclut Jean Sagnes. Mais, souligne-t-il, c'est au détriment de la production languedocienne. Avant 1914, s'installe donc une situation qui durera jusqu'au début des années soixante : l'activité de Sète s'opposait à celle du Languedoc.

Cela ne favorisait pas le développement de la ville-port. Et puis, comme le soulignait le professeur Dermigny (Esquisse de l'histoire d'un port), le choix d'une quasi mono-activité n'était pas raisonnable. Mais Sète eut-elle vraiment le choix ?

Hervé Le Blanche