La ville de Sète, de par son cadre exceptionnel et son foisonnement culturel, n’a cessé d’attirer les artistes depuis plusieurs siècles. De Paul Valéry à Georges Brassens, en passant par Agnès Varda, Robert Combas ou encore Jean Denant, des créateurs en tous genres ont été inspirés et propulsés par l’île singulière. Les multiples expositions et musées, les nombreux festivals, et l’importante concentration d’artistes viennent asseoir le rayonnement culturel de Sète. Un bouillonnement que la Ville s’emploie à accompagner et promouvoir.
Quatre lieux de création
Favoriser la création artistique, sous toutes ses formes, c’est dans cet esprit que la municipalité encourage activement les artistes en déployant de multiples actions en leur faveur. Ainsi, la Ville peut se targuer de détenir pas moins de quatre ateliers d’artistes. Le premier, situé à l’ancien collège Victor Hugo, l’un des plus connus des Sétois, concentre actuellement une vingtaine d’artistes. Ils y étaient autrefois plus nombreux, mais une partie d’entre eux a déménagé au chai Saint Raphaël, autre atelier situé rue Révolution, et réaménagé en 2016 par la ville.
Ce vestige du passé vinicole sétois accueille actuellement une vingtaine d’artistes, qui ont su faire renaître ce lieu aux proportions vertigineuses. Sa configuration est conviviale : installés aux premier et second étage les artistes ont investi des boxes communicants. Une salle encadrée d’une verrière fait office de réfectoire collectif, et vient parachever la chaleur de ce lieu de vie. “Nous organisons des meetings chaque vendredi pour manger ensemble, et nous réalisons des visites d’ateliers entre nous. Les discussions permettent de nous enrichir. Nous songeons d’ailleurs à faire une exposition en commun”, explique Eva Debreceni, jeune artiste d’origine hongroise installée au chai depuis trois ans en compagnie de son partenaire Peter Lökös.
Outre la chaleur des rapports humains, ces deux artistes émergents peuvent aussi profiter de l’expérience de leurs aînés : “Nous devions faire un dossier pour une exposition en Bretagne, et une artiste du chai qui s’y était déjà rendue a pu nous aider à le réaliser”, raconte la plasticienne. Cette dernière profite aussi des vastes dimensions du lieu : “Je peux travailler sur des pièces beaucoup plus grandes par rapport à chez moi, où cela devient très vite difficile. Entre collègues, on peut s’organiser sur de plus larges espaces, et utiliser le rez-de-chaussée pour faire des installations de grande envergure. En visualisant ces projets avec un logiciel 3D, ce n’est pas pareil”, détaille t-elle. Les artistes installés dans les ateliers bénéficient d’une convention annuelle à titre gracieux. En contrepartie, ils doivent s’investir dans des actions entrant dans le cadre de la CGEAC mise en place par la Ville (Convention de généralisation de l’éducation artistique et culturelle).
Elle vise à développer l’éducation artistique à destination des publics âgés entre 3 et 18 ans. Concrètement, les artistes doivent intervenir dans des activités extrascolaires, ou périscolaires tels que des ateliers de sensibilisation. “A Sète, nous sommes vraiment privilégiés, que ce soit au niveau de la vie culturelle, de l’acceptation des artistes, ou de la considération que l’on nous porte. Il y a un réel soutien de la mairie. À côté de ça, on donne des cours en échange : c’est mon cas aux Beaux-arts”, explique l’artiste Krewst. Saint-Raphaël dispose aussi d’un box pour accueillir les artistes émergents pour une période inférieure à un an. Cela sert notamment aux créateurs qui ont un projet d’exposition et qui cherchent un lieu pour la préparation. Un hébergement temporaire qui leur permet de laisser libre-cours à leur esprit créatif.
“Je trouve important que le chai soit rattaché à la ville, et non pas à une labellisation comme c’est le cas du CRAC ou du MIAM. L’avantage des lieux prêtés par la mairie, c’est que nous avons une liberté rare. Car le label a tendance à créer des modèles qui finissent par se figer, et limitent la création. Ici, on a une multiplicité de modèles grâce à la présence des différents artistes. Cet espace nous permet d’aller au-delà des figures qui existent déjà”, déclare Germana Civera, artiste plasticienne et chorégraphe qui a déménagé du collège Victor Hugo au chai Saint-Raphaël. Outre ces deux ateliers, la Ville abrite des artistes dans des anciens logements de fonction des écoles. C’est le cas de Gaston Baby, qui héberge deux artistes. Mais aussi d’Eugénie Cotton, qui possède un atelier géré par l’association Athéna dont le projet consiste à établir des résidences destinées aux jeunes femmes artistes du monde entier. Quatre personnes bénéficient de cette résidence chaque année, ce qui donne lieu à une restitution commune à la chapelle du Quartier Haut.
Les JAPO, une initiative Sétoise
Si les férus d’art ont souvent l’occasion d’assister à des vernissages ou des expositions, rares sont les instants où le peintre, le sculpteur ou le plasticien ouvre les portes de son atelier. C’est pour cette raison que la Ville a décidé il y a deux ans de créer un second rendez-vous de ses Journées ateliers portes ouvertes (JAPO) à l’automne en plus de celui à succès du printemps. L’idée est apparue si séduisante que la Région a décidé d’étendre le modèle sétois à travers toute l’Occitanie. La journée portes ouvertes de l’automne est donc maintenant inscrite dans un cadre régional. Sète diffère cependant légèrement dans la mesure où elle ouvre cette manifestation aux amateurs, contrairement à la Région qui la destine aux professionnels. Ce rendezvous désormais incontournable de la rentrée est un moment convivial qui remporte généralement un grand succès, et draine un public régional.
“Les JAPO sont des journées importantes, car les habitants viennent, et voient que nous faisons aussi partie du quartier, et sommes des habitants comme les autres. Souvent, les gens se font une idée formatée des artistes. Ce jour-là, nous avons une proximité avec le public qui peut être au coeur du terrain”, explique Germana Civera. Les JAPO et les diverses manifestations culturelles ont malheureusement été compromises à cause de la crise sanitaire, qui s’avère un coup dur pour les artistes. Consciente de ces difficultés, la mairie a débloqué un fonds spécial de soutien via l’achat d’une œuvre aux créateurs inscrits à la Maison des artistes. Une enveloppe totale de 96 000€ a été affectée à 48 artistes. Les œuvres acquises par la Ville feront l’objet d’une exposition à la chapelle du Quartier Haut, et seront présentées dans les écoles dans le cadre de la CGEAC. Assurément, quand la vie culturelle reprendra, les artistes et la ville de Sète seront au rendez-vous pour présenter leurs projets et ravir les visiteurs ; justement au moment où la culture semble si primordiale.
“La ville de Sète a compris l’importance de la culture, et les enjeux que cela représente. Les Sétois en sont passionnés. Il y a une dynamique qui existe dans cette ville, de par sa géographie : sa luminosité est une vraie source d’inspiration, car elle nous permet de mieux percevoir la lumière, les corps, les objets. Je suis venue ici pour cela : pour moi, c’était comme une révélation”, résume avec poésie Germana Civera.